lundi 24 mars 2008



L'ami Max Papart dont le chemin de peintre était indissociable du tien.
Sans compter les fous rires...


Les gravures c'est eux, fidèles parmi les fidèles
PASNIC


Paolo Ucello 1397- 1475 et le quatrocentto


L'art précolombien et le musée de Mexico que James a parcouru plié en deux à cause d'une sciatique.
Sauf que rien ni personne n'aurait pu l'empêcher de s'y repaitre de ces témoignages de culture...


L'art africain, une autre passion et tant de souvenirs


Pietro Lorenzetti.
Descente de croix. détail
Fresque. basilique inférieure d'Assise- Vers 1325.


Merci à Thomas et Kalle pour leur superbe site et leur fidèle amitié.
http://www.gkm.se/


l'archéologie et toutes les traces que l'humanité a légué au fil des siècles...


tendresse, tendresse...


Les déserts, étendues immenses et silencieuses qui fascinaient ton regard de peintre...


j'aime cette photo qui te ressemble tant...
Il y avait la peinture, ta passion première. Et autour de la peinture, la sculpture, la gravure, le dessin et toutes les formes de création possibles.

Il y avait les amis que tu protégeais et épaulais.Les amis de toujours comme Pierre le fidèle, Guy et Nicole, Pascal, Nicolas, Jo et Lulu et tous les autres si nombreux que tu ne jugeais jamais.

Il y avait les femmes que tu aimais jeunes, belles et vivantes.

Il y avait les plaisirs de la vie, les bons repas partagés, les bons vins, la musique, les mots...

Mais surtout il y avait tes enfants Pascale, David, Emma et Simon que plus que tout au monde tu as aimé et soutenu...


Il y a tant d'amour et de tendresse à partager...


Un moment de bonheur.

Mémoires...Silence

Espaces abimés, construits puis déchirés.
Les mots ne sont pas là pour décrire. Tout juste peuvent-ils s'écrire dans la marge,
dans l'à côté de l'oeuvre peinte.
Espaces imaginés par la main, architecte d'un lieu qui se donne à voir dans le blanc de la mémoire.
Espaces de saintes colères.
Mémoire de la main: Du tracé initial à la plus subtile sophistication.
La main trace, cherche, hésite un instant.
Mémoires...Silence

Dialogue muet entre la parole et le geste, toujours inachevé, imparfait.
La main arrache, salit. Elle trouve sa propre limite.
Vingt six lettres pour écrire l'inavouable inquiétude.
Geste syncopé au delà de toute reflexion. Plus encore:
Dans une reflexion qui se veut au delà du possible.
Espaces de déchirure où le geste restitue toutes les mémoires humaines.

Inévitable rapidité du geste peint.
Necessaire conquête du mot juste.

Double expérience du geste et de la parole où le blanc se confond avec la lettre, la couleur avec le silence.

La main tremble, griffe. La main carresse des espaces devenus chair.
Silence rendu à son initiale pureté dans une souffrance qu'aucun geste, aucun mot ne peut révéler.

Dialogue du rouge et du bleu, de la lettre et de la couleur.
S'agit-il d'avouer sa peur par la violence du geste?
Ou plutôt de dire son appartenance au monde malgré sa violence?

Mémoires...Silence.

Espaces que l'on gravit, dans la rage d'une vérité inaccessible.
Espaces indissociables, uniques.

Double exigeance du geste et de la parole, où la couleur se confond avec la mémoire, la lettre avec le silence.

Peintures inachevées? Livre mille fois recommencé.
Dessins? Phrases sans sujet.

La main bâtit, détruit.

S'agit-il de trouver la réponse définitive?

Ou plutôt de laisser les mains libres de leur interrogations?

Tout juste les mots peuvent ils s'écrire autour de l'oeuvre peinte.

Texte écrit en 1987.


James aimait les mots et les poètes.
Jean Tortel, Tita Reut, Jean Rollin, Georges Tabaraud, Michel Bohbot, François Bénichou, Marcelin Pleynet et tant d'autres furent ses amis...


La série des fenêtres.
Au détour d'une ballade dans Dallas, nous apercevons un immeuble en destruction. Pour se protéger, les ouvriers ont installé d'immenses bâches de couleur qui forment comme des fenêtres entrouvertes sur le monde extérieur.
Nous sommes restés très longtemps devant cet immeuble et James s'en est nourri pendant des années...

La Nouvelle Orleans




Sans doute une des plus belles et plus créatrices périodes. Le jazz, la gentillesse des gens, notre ami Max Papart. Que du bonheur!


"Henri Goetz me disait : "Pour toi qui ne veut te plier à la discipline de la gravure classique, j'ai trouvé une technique qui doit te correspondre (le carborundum)". - James Coignard

Peintre, sculpteur, graveur français est né à Tours en 1925. Il vivait et travaillait à Antibes (Alpes-Maritimes)et nous a quitté en mars 2008. James Coignard commence ses études à l’Ecole des Beaux-Arts de Nice en 1948. Si son parcours commence par la Côte d’Azur pour s’y poursuivre encore aujourd’hui, Coignard aura été très itinérant, vivant d’ailleurs une période américaine à la Nouvelle-Orléans (1985-88). Sa carrière d’artiste est émaillée d’expositions collectives et personnelles en France et à l’étranger où son art est souvent reconnu (Suède, Suisse, Etats-Unis, France, etc.). Peindre certes, mais aussi sculpter (Sculptures de verre, Venise, 1961 / Bronzes en 1977), il réalisera et exposera, en 1975, quatorze tapisseries à Brno (Tchécoslovaquie). Son oeuvre gravé reconnaissable entre tout, gravures au carborundum essentiellement, est commencé en 1968. Il mariera son talent à un grand nombre de poètes avec lesquels il aime à faire le chemin d’un livre. Jusque dans les années 60, Coignard peint dans un esprit expressionniste, des couleurs atténuées et une matière très travaillée. Son chemin le mène à l’abstrait, se composant de taches aléatoires, de formes régulières, de caractères typographiques. Les fonds reçoivent une matière importante, les harmonies sont souvent brunes ou grises. L’homme a le regard droit, la parole et le geste calme qui réfléchissent, sans doute à l’écoute du monde qui l’entoure de tant de laideur, de tant de beauté.


Henri Goetz est né a New York en 1909 d'une famille fanco-américaine. Il arrive a Paris en 1930 pour s'y installer définitivement et se consacrer à la peinture. Il épouse en 1935 le peintre Christine BOUMEESTER qui l'initie dès 1938 à la gravure et à la lithographie. Particulièrement curieux et inventif, Goetz explore toutes les techniques de gravure et de tirage.
En 1959 le couple quitte Montparnasse pour se fixer rue de Grenelle. Très vite, ils se heurtent à des difficultés dans leurs activités de graveur : les vernis crèvent, le nettoyage des planches est difficile.
Persuadé que la qualité de l'eau de son nouveau quartier est en cause, Goetz se lance dans la recherche d'une technique qui n'utiliserait pas l'eau.
C'est ainsi que pendant dix ans, aidé du chimiste Eric Schaeffer et de Marc Havel, il met au point ce qui devient en 1967 La gravure au carborundum.
Il suffit au graveur de déposer sur le métal une résine plastique à laquelle il ajoute du carborundum en grains plus ou moins fins.
Cette matière retiendra l'encre avec une grande variété de nuances et de structures. Ce procédé convient admirablement bien aux peintres. Suffisamment large dans son utilisation, le principe technique s'adapte à toutes leurs exigences : libérés des dures contraintes de la gravure classique, ils l'utilisent à leur manière. Les matières déposées sur la planche en épaisseur forme un relief qui défoncera plus ou moins le papier.
L'accroche de la lumière sur les couleurs leur confère une vibration et une luminosité jusqu'alors inconnues dans l'estampe.

La résine déposée sur la planche peut être du Sintofer, de l'Araldite, de la colle a carrelage, des matières plastiques fondues ...
Les grains de carborundum peuvent se juxtaposer ou se remplacer par du sable, du verre ... Le support lui-même peut être de métal, de contreplaqué, de carton ... La liberté et les possibilités de cette technique sont quasi infinies : il ne s'agit plus de creuser une planche, mais d'y déposer des matières susceptibles de créer des creux.

James restera sans doute comme le grand graveur de notre siècle.

"Je balafre la toile comme je pose un doigt frémissant sur un visage aimé.
Le geste est la cicatrice du peintre"
James Coignard

La gravure

James était l'homme de la matière et de la couleur....

Le carborundum
La technique mise au point par Henri Goetz pendant de longues années de recherches est une technique aboutie. Elle utilise à la fois un matériau extêmement dur et stable, le carborundum ( cette poudre est utilisée dans l'industrie de rodages divers, travail du verre, travail de la fonte, polissage de pierres) avec des vernis ou des résines qui durcissent au séchage*. Le mélange pâteux des deux produits appliqué à la brosse et travaillé sur une plaque de métal donne en séchant une matière très dure, plus ou moins épaisse suivant la valeur du grain utilisé et les effets que l'on souhaite obtenir. Cette préparation offre l'avantage de pouvoir être encrée, essuyée, et imprimée comme une gravure en taille-douce, sans avoir à creuser le métal.
L'utilisation du métal comme support n'est pas obligatoire. D'autres matériaux résistants et stables peuvent être utilisés, tels que le Plexiglass, le Perspex, les laminés ou encore les plaques Offset usagées.
l'encre employée, noire ou couleur, est la même que pour la taille-douce, rendue plus fluide pour permettre un encrage au pinceau, avec des brosses plus ou moins large selon les surfaces à encrer. L'essuyage peut se faire à la tarlatane, avec éventuellement un fini au papier de soie lorsqu'il s'agit de surfaces avec des grains de carborundum particulièrement fins(600 et plus)
L'impression se fait sur une presse taille-douce, avec une pression moins forte que pour la gravure en creux, et avec un habillage plus souple composé de un ou deux caoutchouc mousse et de deux feutres.
La technique du carborundum convient très bien à la couleur et donne une grande richesse platique de matières et de formes on peut la combiner avec d'autres techniques de gravure.

* On peut utiliser des liants acryliques, des colles acryliques, des colles vinyliques, des colles synthétiques.

Bruno Groensteen


La série des mannequins

Ce regard que l'on n'oubliera pas...


Ce blog a été créé pour Simon et pour tous ceux qui ont aimé James et qui ont besoin ou envie, au delà de sa disparition, de poursuivre le dialogue...
James Coignard est parti, il s’en est allé à l’approche du printemps...
A nous de fermer les yeux du peintre… De nos doigts frémissants sur une œuvre aimée…
Laisser résonner en nous cette cicatrice gravée de silences, sur les stratifications secrètes de la mémoire du peintre James Coignard.


Dans l’œuvre de James Coignard, j’ai vu des fenêtres de maison condamnée dans les abîmes de l’oubli, des lignes en questionnement d’un point vers l’autre, A vers B, 1 vers 2 puis vers S, Deux bleus, Des rouges en situation, un horizon cherchant en vain à rejoindre d’autres points, Des positionnements, Des propulsions… La dynamique verticale nous ramène au point , Les Corrosions au sillage du temps , de la verticale, du trait d’union, du fil à plomb, des ponts de signes gravés, inventés, réécrits jusqu’au lit de la rivière, sous Tension horizontale…

Cet équilibre latent des figurines, mannequins, prêts à vivre, à s’animer mais comme retenus dans les fibres du papier, de l’écorce, de la peau parcheminée de la cicatrice de ce peintre…

Des papiers mordus de cette originelle incision, d’une saignée puissante d’intérieurs vers d’autres extérieurs, d’un double se cherchant en s’effaçant en une image sans miroir, faite parfois de contours tracés, écrits, crayonnés mais non de l’enfance, semblant venir de rêves ininterrompus et répétitifs...
James Coignard a tracé un parcours sans interruption, sans rendez-vous, du fini du collé du repris du jeté, du corps, des morceaux de mer, de nuages, des flèches lancées pour qu’elles se perdent…

Qui est le double approché en cette immense solitude ? que James Coignard n’a cessé d’inscrire silencieusement, de peindre en remaniements modifiés de verticales en directions suspendues, James Coignard n’a eu de cesse de peindre la pesanteur, l’équilibre des formes semblant se balancer sans effort, cherchant à déterminer de mystérieuses présences, des points d’alignements, d’intermédiaires, entre les formes, de suspensions entre les couleurs.


James Coignard croisé entre le haut, entre le bas, ne s’est interrompu de mettre en réserve entre les lettres, une numérotation et des ponctuations graffitées, un là-bas, au-delà, à relire, à comprendre, un langage d’un autre temps, celui d’une mémoire ancienne…
Une peinture pour renaître, pour revivre, pour revenir…

Il y a quelques années j’ai réalisé une exposition à la Galerie Fersen* à Antibes, James Coignard était venu voir cette exposition, il avait inscrit ces mots sur le livre d’or de la galerie « Les beaux espaces... Bravo »
Continuant de peindre, j’ai essayé de garder en matiére, cette sentence…

Willem De Kooning écrivait « en peinture il arrive un moment où l’on se promène dans ses propres paysages… »
J’entends paysages comme de bien beaux espaces et je souhaite en pleurant une belle promenade à James Coignard, ce grand peintre, qui s’en est allé juste à l’approche du printemps, en ses bleus espaces …

*La Galerie Fersen créé par Judith Fox à Antibes, a défendu avec une grande passion les travaux de James Coignard.
De nombreuses œuvres gravées et peintes s’inscrivaient parfaitement sur les murs de cette petite galerie dont le combat d’une grande intensité résonnait haut et fort, au coin de la rue Fersen. Une exposition de dessins à l’encre de chine, de peintures et de gravures de 1965 à 1992 de James Coignard, y avait été présentée en décembre 1992.

Daphné Bitchatch/ Paris/ Mars 2008

Merci pour ce très beau texte